Photo Credit: Global Diaspora News (www.GlobalDiasporaNews.com).

Légende : Ici, 15 mars 2023, dans la cour de l’université Joseph Ki-Zerbo, les étudiants regroupés en soutien aux délégués de l’UFR/SVT convoqués par l’administration. Depuis l’entrée du système Licence-Master-Doctorat (LMD) en 2009-2010, les universités burkinabè n’arrivent pas à respecter le calendrier des années académiques./Photo-UGEB.

Ouestafnews – Autrefois réputée pour la qualité de son enseignement, l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou connaît des dysfonctionnements dans l’exécution du calendrier académique. Ces impairs qui durent depuis plus d’une décennie ont déstabilisé les enseignements.

Yacouba Drabo est arrivé sur le campus de Zogona – appellation familière de l’Université Joseph Ki Zerbo – en 2016. Mais ce n’est qu’en 2022 qu’il a pu obtenir sa licence en Sciences et technologies. Six ans d’un cursus qui ne devait durer que trois ans !

« En réalité, il faut maintenant deux ans pour terminer une année académique, sans avoir repris une classe, soit une année entière pour finir un semestre », explique ce jeune enfin diplômé. « C’est très compliqué de supporter et il faut être patient », confie-t-il à Ouestaf News, l’air dépité.

Comme beaucoup d’autres étudiants, Yacouba a dû jongler entre petits jobs de commerçant, de répétiteur pour élèves à domicile et bien d’autres activités pour se prendre en charge. Cependant, il n’a jamais perdu de vue l’objectif fixé depuis le lycée. Aujourd’hui, il prépare son master.

Moins tenace peut-être, Abdoul Kaboré a décroché dès la 2ème année, las d’attendre une normalisation des années académiques qui n’arrivait jamais. Lui qui rêvait de devenir enseignant s’est résigné à vivre du petit commerce dans le brouhaha du grand marché de Ouagadougou depuis plus de deux ans.  « Quand j’ai observé la situation, je me suis rendu compte que je prenais de l’âge alors que les parents comptent sur moi », dit-il sur un ton triste.

Mohamed Sawadogo (nom d’emprunt, NDLR), actuellement enseignant-vacataire dans les lycées et collèges, est arrivé au département de SVT – Science et vie de la terre (auparavant dénommé Science et technologie) à l’Université Joseph Ki-Zerbo en 2009–2010 (année de mise en œuvre du système Licence-Master-Doctorat). Il se destinait à la filière Mines et géologie, il a fini par jeter l’éponge pour passer le concours de la fonction publique afin de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille.

« Rentrés en 2010, notre première promotion de licence est sortie en 2014 ; moi j’ai terminé en 2017, parce que j’ai repris un semestre », raconte-il à Ouestaf News.

Chevauchement des années académiques

Le 2 juin 2023 devant l’assemblée nationale, Adjima David Thiombiano, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, a admis que toutes les universités publiques au Burkina sont affectées par les retards de leur calendrier.  Ces retards vont de six  à 24 mois dans les filières et universités ayant de gros effectifs et de trois à six mois dans les universités et filières à effectifs réduits, avait ajouté le ministre.

A l’Université Joseph Ki Zerbo, l’ampleur des retards, ainsi que les conditions  d’études au niveau de l’UFR/SVT, auparavant UFR/ST, ont fait que cette Unité de formation avait reçu des étudiants, le sobriquet peu flatteur d’UFR « Sciences de la terreur » ! Le 7 juillet 2023, la section SVT de l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) a confié à la presse que leur UFR compte quatre années académiques pour la licence (2019 – 2020, 2020 – 2021, 2021 – 2022, 2022 – 2023).

Selon l’ANEB, la période de fin juillet 2023 est normalement la période où les programmes doivent être bouclées dans les différentes promotions à l’Université Joseph Ki Zerbo, mais très peu de promotion (Bacheliers de 2022) ont fini la première année, exceptée l’Institut burkinabè des arts et des métiers (IBAM), où le retard est moindre.

Ouestaf News n’a pas pu avoir de précision sur les effectifs de ces différentes promotions malgré ses démarches auprès de l’ANEB et de la vice-présidence chargée des enseignements de l’université.  

D’autres unités de formations comme l’UFR /LAC (Lettres art et communication) et l’UFR/SH (Sciences humaines) ne sont pas épargnées par ces retards. Dans sa sortie du 13 juillet 2023, la Fédération estudiantine et scolaire pour l’intégrité au Burkina Faso (FESCI-BF), a affirmé que la promotion 2018 de Lettres modernes, un département de l’UFR/LAC, est toujours en année de licence. Plus de cinq ans et toujours sans le diplôme qui devrait pourtant être obtenu au bout de trois ans.  La FESCI-BF a aussi informé que la promotion 2022 de philosophie, à l’UFR/SH, venait tout juste de commencer son année académique, soit un an de retard.

A qui la faute ?

Le retard dans les années académiques a commencé en 2006-2007 par quelques mois d’enseignements perdus à causes des manifestations d’étudiants pour revendiquer de meilleures conditions d’études. Il s’est accentué courant 2008 suite à la décision de fermer l’université à cause de ces manifestations persistantes, parfois émaillées de scènes de violence. L’entrée en vigueur du système Licence-Master-Doctorat (LMD) à partir de 2009 viendra aggraver la situation.

Au-delà de l’université Joseph Ki-Zerbo, le problème affecte actuellement toutes les universités publiques du Burkina Faso. Étudiants et autorités en charge de l’enseignement supérieur se rejettent les responsabilités. Les associations estudiantines pointent du doigt les mauvaises conditions d’études et la mise en œuvre « hasardeuse » du LMD. Elles déplorent, entre autres, l’insuffisance voire le manque d’infrastructures adéquates et d’enseignants, le retard dans la correction des copies des évaluations.

Répondant à une question orale de l’Assemblée législative de transition, le 2 juin 2023, le ministre en charge de l’enseignement supérieur a affirmé que l’effectif des universités publiques du Burkina Faso est estimé à 190 000 étudiants, pour 80 000 places disponibles. Plusieurs ministres en charge de l’enseignement supérieur et présidents d’universités qui se sont succédé reconnaissent que le retard est un problème structurel. Cependant, ils accusent les étudiants et les interminables manifestations.

Statu quo

Au cours d’une  rencontre  à l’Université Thomas Sankara le 23 juillet 2023, le ministre Thombiano a interpellé les enseignants, étudiants et personnel administratif, sur la nécessité de sortir les universités publiques des retards académique. Pour lui, cela passe par une bonne planification et une programmation claire des activités académiques et l’impératif pour chaque acteur de la chaîne de jouer son rôle.

Par ailleurs, il préconise l’orientation des nouveaux étudiants à l’université virtuelle du Burkina dès la rentrée universitaire 2023-2024, avec possibilité de « suivre les cours en temps réel et de partout ». Ouestaf News n’a pas pu confirmer ou infirmer la mise en œuvre effective de cette mesure.

Déjà, en 2021, le Pr Frédéric Ouattara, alors président de l’université Norbert Zongo, à Koudougou, esquissait dans les colonnes du quotidien Sidwaya des pistes de solution pour résorber les retards. L’une d’elles consiste à former les étudiants sur le système des questions à choix multiples (QCM).

Il avait aussi émis l’idée d’acquérir des « machines à correction pour alléger la tâche des enseignants » ainsi que la construction de nouvelles infrastructures.

Pour désengorger les universités publiques, l’État oriente, depuis bientôt quatre ans,  certains nouveaux bacheliers dans les universités privées. Mais cette idée née sous le ministre Alkassoum Maïga n’a pas encore produit de résultats tangibles.

GS/md/ts

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