La Dominique est particulièrement vulnérable aux phénomènes météorologiques extrêmes, qui sont exacerbés par la crise climatique. À l’instar de l’ouragan dévastateur Maria de 2017qui a endommagé la quasi-totalité des maisons et des bâtiments, détruisant environ les trois quarts de la flotte de pêche et paralysant l’économie.

Le peuple autochtone Kalinago a été particulièrement touché et, depuis, les dirigeants de la communauté travaillent avec l’ONU pour aider sa population à devenir plus résiliente, en prévision du prochain choc climatique.

A l’occasion de la session de 2024 de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones (UNPFII), ONU Info a rencontré Sylvanie Burton – qui est à la fois la première Kalinago et la première femme chef d’État du pays – et Lorenzo Sanford, le plus jeune chef de la communauté Kalinago – pour savoir comment ils comptent rendre l’île « résiliente au climat » , et pourquoi les jeunes de la communauté sont au cœur de la résurgence de la culture autochtone sur l’île.

Sylvanie Burton (g), Lorenzo Sanford (c), Conor Lennon (d)

Lorenzo Sanford : Par le passé, c’était toujours les mêmes personnes qui étaient élues chefs. Je voulais faire la différence, en adoptant une approche de terrain, et présentant le point de vue de personnes plus jeunes, car notre communauté compte beaucoup de jeunes.

ONU Info : Que pensaient les anciennes générations de la communauté Kalinago de la nomination d’une si jeune personne au poste de chef ?

Sylvanie Burton : La population Kalinago est composée d’environ 65% de jeunes, nous voulions donc donner à nos jeunes la possibilité de faire la différence. Nous nous sommes ralliés à Lorenzo, ce qui lui a donné le niveau d’autorité nécessaire pour devenir chef.

ONU Info : Quel a été l’impact de l’ouragan Maria sur le territoire Kalinago ?

Lorenzo Sanford J’étais dans une autre partie de l’île quand Maria a frappé, et je voulais prendre des nouvelles de ma famille. Il n’y avait pas d’Internet, pas de téléphone, et les routes étaient bloquées. Le seul moyen de rentrer était donc de marcher, en empruntant les sentiers traditionnels.

Lorsque j’ai traversé les montagnes, tout était brun, il n’y avait plus de verdure. Tout ce que l’on voyait, c’était des maisons détruites et des gens qui avaient l’air perdus, ne sachant pas quoi faire.

Sylvanie Burton : Avant que Maria ne touche les terres, je savais que notre île allait être frappée de plein fouet. Nous avons donc convoqué un conseil d’urgence et décidé de nous rendre au domicile des personnes âgées pour les emmener dans les abris. En milieu d’après-midi, la plupart des personnes vulnérables avaient été mises en sécurité.

C’est alors que la tempête tropicale a commencé à arriver. La mer était déchaînée et je pouvais entendre le mugissement du vent venant de la vallée. La tempête nous a assaillis pendant des heures et des heures. 

J’ai commencé à prier et j’ai même demandé à Dieu pourquoi il ne répondait pas à nos prières. J’étais reconnaissante d’être dans une structure en béton, et je ne pouvais qu’imaginer ce qui arrivait à nos concitoyens vivant dans de petites maisons en bois dans le reste du territoire Kalinago.

Le lendemain, une fois la tempête passée, nous avons pensé que la mer était très proche de nos maisons. Ce n’était pas le cas, mais nous en avions l’impression car tous les arbres et toutes les maisons avaient disparu.

C’était une expérience très douloureuse que l’on ne souhaite à personne. C’est un miracle que personne ne soit mort sur notre territoire.

Bâtiment traditionnel Kalinago, renforcé par du béton

ONU Info : Avant l’ouragan, la plupart des bâtiments étaient en bois, mais j’ai vu plusieurs maisons et bâtiments en béton. Cette construction fait-elle partie des efforts pour rendre la Dominique plus résistante ?

Lorenzo Sanford : Oui. Dans le territoire Kalinago, de nombreux projets de logement sont en cours. Nous sommes allés dans la communauté avec les différentes agences qui proposaient leur aide, pour voir comment nous pourrions construire des maisons plus solides, tout en conservant le style Kalinago. 

Nous construisons également un grand abri communautaire polyvalent, mais nous voulons que davantage de personnes se sentent plus en sécurité dans leur propre maison la prochaine fois qu’une tempête tropicale frappe.

ONU Info : L’accès à des informations fiables est essentiel pour sauver des vies. Comment vous assurez-vous que le plus grand nombre possible de personnes reçoivent des alertes précoces en cas d’événements météorologiques extrêmes ?

Sylvanie Burton : Nous nous efforçons d’obtenir de meilleures informations sur le climat et de les transmettre à la population avant que les tempêtes ne frappent. Nous créons également des centres TIC (technologies de l’information et de la communication) à travers la Dominique, où les gens peuvent accéder aux informations avant les tempêtes, afin de prendre des précautions et se rendre dans un abri à l’avance.

Territoire de Kalinago, Dominique

ONU Info: L’obtention des fonds nécessaires pour faire face aux conséquences de la crise climatique est une question qui concerne tous les petits États insulaires en développement, et pas seulement la Dominique. Vous n’êtes pas responsables de la crise, mais vous en subissez les conséquences de manière disproportionnée. Est-il plus facile d’accéder aux fonds dont vous avez besoin pour vous adapter ?

Sylvanie Burton : Lors des conférences des Nations Unies sur le climat, les grands pays pollueurs promettent de donner des fonds et de réduire leur propre empreinte carbone. Mais ces pays doivent passer de la parole aux actes.

Par exemple, après l’ouragan Maria, le Secrétaire général des Nations Unies s’est rendu en Dominique et plusieurs pays se sont engagés à apporter leur aide. Mais beaucoup de ces promesses n’ont pas été tenues. Nous avons dû obtenir des prêts pour nous assurer que nous construisions un pays résilient au changement climatique.

Nous sommes très reconnaissants aux organisations des Nations Unies qui aident la Dominique, ainsi qu’aux pays qui nous aident, mais il en faudra un peu plus. Ces grands pays doivent joindre l’acte à la parole !

ONU Info : Les Kalinago vivent sur cette île depuis plus de 500 ans. Ce savoir populaire accumulé vous a-t-il aidés à vous adapter au changement climatique ?

Lorenzo Sanford : Je dirais que cela nous a aidés à rebondir très rapidement. Par exemple, nos pratiques autochtones influencent la manière dont nous plantons nos aliments. 

Nous espérons donc que ces connaissances seront transmises aux jeunes générations, afin que nous puissions préserver notre avenir, tant sur le territoire Kalinago que sur l’ensemble de l’île.

Cet entretien a été édité pour des raisons de clarté et de longueur.

Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).

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