Depuis plusieurs jours, les Forces de soutien rapide (FSR) concentrent leurs offensives dans la région centrale du Kordofan, où les paramilitaires ont engrangé des gains territoriaux significatifs, s’emparant de Babanusa, puis de Heglig, un site pétrolier stratégique par lequel transite le brut sud-soudanais vers la ville de Port-Soudan, sur la mer Rouge. Kadugli et Dilling, deux villes déjà fragilisées, sont désormais soumises à un encerclement progressif.
Le Sous-Secrétaire général de l’ONU pour le Moyen-Orient, Mohamed Khaled Khiari, a mis en garde lundi contre une dynamique de conflit de plus en plus instable et diffuse. Ces développements, a-t-il souligné lors d’une réunion du Conseil de sécurité convoquée en urgence par le gouvernement soudanais, « reflètent la nature de plus en plus complexe du conflit et l’élargissement de ses dimensions régionales », faisant planer le risque de voir « les voisins du Soudan entraînés dans un conflit régional ».
Le basculement géographique en cours s’inscrit dans une continuité. Avant le Kordofan, le Darfour a constitué le cœur des opérations des rebelles. À El Fasher, capitale du Darfour du Nord et dernier bastion gouvernemental de la région, les FSR ont imposé un siège de plus de 540 jours avant de s’emparer de la ville, fin novembre. Sa chute a provoqué le déplacement de centaines de milliers de personnes et mis en lumière la brutalité extrême des forces assaillantes, accusées de massacres de civils à caractère ethnique.
Pour de nombreux observateurs, ce qui se joue aujourd’hui autour d’El Obeid, capitale du Kordofan du Nord, rappelle les étapes qui ont précédé la chute d’El Fasher : asphyxie progressive, entraves aux déplacements, attaques répétées contre les infrastructures civiles, puis effondrement.
Un vaste camp de réfugiés à Tawila, au Darfour soudanais, où des centaines de milliers de personnes ont fui El Fasher.
La guerre par drones, au prix fort pour les civils
À cette dynamique territoriale s’ajoute une mutation des moyens militaires. Le conflit se technologise. Les frappes de drones, de plus en plus fréquentes et sophistiquées, élargissent le champ de la violence et accroissent le nombre de victimes civiles. À Kalogi, dans le Kordofan du Sud, une attaque a successivement touché une école maternelle puis l’hôpital où les blessés avaient été transférés, faisant plus de cent morts, dont une majorité d’enfants.
Quelques jours plus tard, une base logistique des Nations Unies à Kadugli était à son tour frappée, tuant six Casques bleus bangladais de la force déployée à Abyei. « La sécurité de nos soldats de la paix n’est pas négociable », a averti Mohamed Khaled Khiari devant le Conseil de sécurité, rappelant que de telles attaques peuvent constituer des crimes de guerre.
Une crise humanitaire qui s’étend et se durcit
Sur le terrain humanitaire, la situation se dégrade à grande vitesse. Les sièges imposés à plusieurs villes du Kordofan entravent l’accès à la nourriture, aux soins et à l’aide d’urgence. « La brutalité de ce conflit semble sans limites », a résumé devant le Conseil Edem Wosornu, du bureau onusien des affaires humanitaires, au nom du chef des affaires humanitaires de l’ONU, Tom Fletcher.
Autour d’El Obeid, les bombardements se poursuivent tandis que des civils seraient empêchés de quitter les zones de combat et soumis à des recrutements forcés. Les humanitaires eux-mêmes sont pris pour cible : début décembre, un chauffeur du Programme alimentaire mondial (PAM) a été grièvement blessé dans une attaque contre un convoi, la sixième visant des actifs de l’agence cette année.
Le Darfour, lui, continue de sombrer hors champ. À El Fasher et dans les camps de déplacés alentour, les Nations Unies documentent des massacres, des violences sexuelles systématiques et le blocage délibéré de l’aide. « Nous continuons de recevoir des informations faisant état de violations graves du droit international humanitaire », a rappelé Mme Wosornu, évoquant notamment les exactions commises lors de l’offensive contre le camp de Zamzam.
Une guerre née d’une rupture au sommet de l’État
Ce conflit trouve son origine dans la rupture, en avril 2023, entre le général Abdel Fattah al-Bourhan, à la tête du pays, et son ancien allié Mohamed Hamdan Daglo, chef des FSR. L’affrontement entre l’armée régulière et les paramilitaires a plongé le Soudan dans une guerre civile qui a fait basculer près de 30 millions de personnes dans la détresse humanitaire et forcé plus de 10 millions d’entre elles à fuir leurs foyers, dont environ la moitié sont des enfants.
L’instabilité à Khartoum a conduit les autorités dirigées par le général al-Bourhan à se replier à Port-Soudan, sur la mer Rouge, devenue capitale de facto d’un État fragmenté.
Une guerre internationalisée, sans ligne rouge
Pour l’analyste Cameron Hudson, la gravité de la situation tient autant à l’ampleur des violences qu’à l’absence de réaction internationale à la hauteur. « À aucun moment de l’histoire moderne du Soudan l’État, ce qu’il en reste, ou sa population n’ont été confrontés à une menace aussi existentielle », affirme-t-il. À El-Fasher, autrefois ville d’un million d’habitants, « il ne reste aujourd’hui que 70 000 à 100 000 personnes ».
Au cœur du conflit, un facteur demeure constant : l’afflux d’armes et de soutiens extérieurs. Cameron Hudson dénonce « une guerre pleinement internationalisée, avec des réseaux financiers, politiques et militaires s’étendant sur plusieurs continents ».
Face à cette spirale, les initiatives diplomatiques peinent à infléchir le cours des combats. « Les parties ont été capables de suspendre les hostilités pour préserver les revenus pétroliers, mais pas pour protéger leur population », a résumé Mohamed Khaled Khiari.
À l’approche du millième jour de guerre, le Soudan apparaît ainsi comme un conflit qui se déplace sans jamais se résoudre, laissant derrière lui des villes assiégées, des civils déplacés par millions et un pays chaque jour un peu plus disloqué.
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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