L’intensité des combats a conféré à cette session une gravité inédite. Outre les échanges de missiles entre l’Iran et Israël, des frappes américaines ont visé, ce week-end, trois sites nucléaires iraniens. Téhéran a riposté lundi en frappant une base militaire américaine au Qatar. Le soir même, Washington annonçait un cessez-le-feu entre l’Iran et Israël — un répit fragile, salué mardi par le Secrétaire général de l’ONU comme une ouverture diplomatique à préserver.

Un accord au bord de la rupture

Dans ce contexte explosif, les membres du Conseil ont débattu de l’avenir du Plan d’action global commun (JCPOA), l’accord conclu en 2015 dans la capitale autrichienne pour encadrer le programme nucléaire iranien. Entériné par la résolution 2231, ce texte visait à garantir son caractère exclusivement pacifique, en échange d’un allègement des sanctions et sous la supervision de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Mais l’accord, affaibli depuis le retrait unilatéral des États-Unis en 2018, puis le désengagement progressif de l’Iran, semble aujourd’hui à bout de souffle. « À moins de quatre mois de l’expiration de ses dispositions, les objectifs de la résolution 2231 et du JCPOA n’ont pas encore été pleinement atteints. C’est regrettable », a déploré Rosemary DiCarlo, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques de l’ONU.

Si elle a salué les pourparlers bilatéraux récents facilités par Oman entre Téhéran et Washington — cinq séries de discussions menées ces derniers mois —, elle a reconnu que ces efforts n’avaient pas permis de rétablir la confiance nécessaire. « Malheureusement, aucune de ces initiatives n’a permis d’assurer la nature pacifique du programme nucléaire iranien ».

L’AIEA dans le brouillard

Le tableau dressé par l’AIEA est tout aussi préoccupant. Dans son dernier rapport trimestriel, daté du 31 mai, l’agence dit avoir « perdu la continuité de sa connaissance » sur plusieurs aspects du programme nucléaire iranien, faute de pouvoir mener ses activités de vérification depuis plus de quatre ans. Elle n’est plus en mesure d’évaluer l’ampleur réelle du stock d’uranium enrichi du pays depuis février 2021.

« Les peuples iranien et israélien ont déjà trop souffert », a souligné Mme DiCarlo, saluant l’annonce d’un cessez-le-feu comme un « progrès important ». Selon les autorités iraniennes, au moins 606 personnes ont été tuées depuis le 13 juin, dont 107 au cours des dernières vingt-quatre heures. Israël fait état de 28 morts et de plus de 1 400 blessés.

L’Union européenne plaide pour la diplomatie

Représentant l’Union européenne en tant que porte-voix de la coordinatrice de la Commission conjointe du JCPOA, l’ambassadeur Stavros Lambrinidis a lui aussi tiré la sonnette d’alarme. « Il existe un risque croissant que ce conflit échappe rapidement à tout contrôle – avec des conséquences catastrophiques pour les civils, la région et le monde », a-t-il averti. Le diplomate d’origine grecque a exhorté les parties à « respecter le droit international, à faire preuve de retenue » et à éviter toute action risquant de provoquer « une potentielle libération de matières radioactives ».

Empêcher que l’Iran se dote de l’arme nucléaire reste, selon lui, une « priorité absolue » pour l’Union européenne. M. Lambrinidis a rappelé que l’enrichissement de l’uranium à 60 % par l’Iran — en violation du JCPOA — s’est récemment accéléré. « L’Iran s’est déjà largement éloigné de ses engagements initiaux […] et poursuit l’extension de son programme à un rythme alarmant, bien au-delà des besoins plausibles d’un usage civil ».

S’il reconnaît l’impact des sanctions américaines sur la situation économique iranienne, il insiste sur l’urgence d’un retour à la négociation. « Soyons clairs : une solution durable à la question nucléaire iranienne ne peut passer que par un accord négocié, non par des actions militaires ». Vendredi dernier, à Genève, la Haute Représentante de l’UE s’est entretenue avec le chef de la diplomatie iranienne, en présence des ministres français, allemand et britannique, pour explorer des pistes de sortie de crise.

En tant que facilitateur désigné par le Conseil pour la mise en œuvre de la résolution 2231, l’ambassadeur de la Slovénie s’est néanmoins voulu positif. Samuel Žbogar a notamment rappelé que les membres du Conseil s’étaient réunis en format restreint, la veille, pour examiner le rapport du Secrétaire général. « Je suis convaincu que, par le biais du dialogue et du multilatéralisme, nous pouvons veiller à ce que le Plan d’action global commun et la résolution 2231 (2015) soient appliqués comme il se doit et ainsi promouvoir la confiance mutuelle et la coopération », a-t-il dit.

Le Représentant l’Union européenne (UE), l’ambassadeur Stavros Lambrinidis, s’exprime au Conseil en tant que porte-voix de la coordinatrice de la Commission conjointe du JCPOA.

L’Iran défend son programme

Le représentant iranien a pour sa part dénoncé une situation profondément injuste. Il a rappelé que les États-Unis s’étaient unilatéralement retirés du JCPOA en 2018, alors même que l’Iran respectait ses engagements. En réponse, Téhéran a été soumis à des sanctions jugées illégales, en violation de la résolution 2231. « Les causes profondes de la situation actuelle sont donc limpides », a-t-il affirmé.

Le diplomate a aussi dénoncé le deux poids deux mesures, soulignant que, contrairement à Israël qui refuse de soumettre ses installations nucléaires aux inspections de l’AIEA, l’Iran avait placé son programme sous une surveillance très stricte. Dix ans après l’adoption de la résolution 2231, a-t-il conclu, le programme nucléaire iranien est pris pour cible par Israël et les États-Unis, au mépris du régime international de non-prolifération. Le Conseil de sécurité, a-t-il plaidé, devrait condamner explicitement ces agressions et promouvoir un retour à la diplomatie.

Les États-Unis et Israël justifient leur intervention

Les États-Unis ont répliqué avec fermeté. L’ambassadrice par intérim Dorothy Shea a accusé l’Iran de « violer ouvertement ses obligations envers l’ONU », citant les transferts d’armes aux houthistes au Yémen, au Hezbollah au Liban, et surtout à la Russie. « Les centaines de drones transférés à Moscou en 2022 pour être utilisés contre l’Ukraine » ont, selon elle, bafoué les termes mêmes de la résolution 2231. La représentante américaine a également dénoncé « l’accélération des activités nucléaires sans aucune justification civile crédible ».

Justifiant les frappes de son pays dans la nuit de samedi à dimanche contre trois sites nucléaires iraniens, elle a assuré qu’il s’agissait d’une « opération de précision […] menée conformément au droit naturel à la légitime défense collective ». Ces frappes, a-t-elle dit, « visaient à atténuer la menace que représentait l’Iran pour Israël, la région et, plus largement, la paix et la sécurité internationales ».

« Le président Trump a clairement réaffirmé qu’il était temps pour l’Iran de faire la paix », a-t-elle poursuivi. Et d’en appeler à la responsabilité collective du Conseil : « En ce moment critique, nous devons tous exhorter l’Iran à saisir cette opportunité de paix et de prospérité et à respecter ses obligations internationales ».

Le représentant israélien a également justifié l’opération militaire conduite ces derniers jours par la nécessité d’éliminer la menace nucléaire iranienne. Affirmant que l’Iran avait déjà dépassé les limites autorisées d’enrichissement dès 2019, il a souligné qu’en juin 2022, Téhéran avait retiré les caméras de surveillance de l’AIEA, accentuant l’opacité de son programme.

Selon lui, le régime iranien est désormais mis à nu. « Cela fait longtemps que l’Iran s’est écarté de ses obligations, et je ne suis même pas sûr qu’il les ait jamais respectées », a-t-il tranché. Il a appelé la communauté internationale à imposer les mesures nécessaires pour priver l’Iran des outils de la destruction. « La diplomatie a échoué », a-t-il conclu, tout en affirmant que son pays répondrait par la force à toute violation du cessez-le-feu ou menace visant sa population.

Moscou fustige l’« hypocrisie occidentale »

La Russie a vivement dénoncé les récentes frappes israéliennes et américaines contre l’Iran, les qualifiant de « violations flagrantes de la Charte des Nations unies ». Le représentant russe a accusé Washington et Tel-Aviv d’avoir « ciblé des installations nucléaires pacifiques placées sous garanties de l’AIEA », évoquant un risque grave de conséquences radiologiques.

Faisant référence à l’adoption, le 12 juin, par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA d’une résolution critique envers l’Iran, le diplomate a fustigé une « initiative arrogante » des Occidentaux, intervenant juste avant les frappes. Il a aussi accusé Berlin, Londres et Paris de vouloir « faire passer pour légitimes » les frappes en invoquant une « menace iranienne fictive ».

Le délégué russe a enfin insisté sur le fait que l’Iran restait membre de l’AIEA et faisait l’objet de vérifications rigoureuses. Rien dans les inspections ne prouve, selon lui, que Téhéran cherche à se doter de l’arme nucléaire.

Une architecture en sursis

Alors que la résolution 2231 qui sous-tend l’accord de Vienne arrive à échéance le 18 octobre prochain, seules subsistent des mesures restrictives liées aux activités nucléaires et aux transferts de matériel ou de technologie sensible. Ces dernières arriveront également à expiration à l’automne, à moins qu’une nouvelle décision du Conseil ne les renouvelle. Mais le climat de méfiance actuel ne s’y prête guère et fait craindre un vide juridique, ou du moins une perte de surveillance des activités nucléaires de l’Iran.

« Le cœur du conflit actuel porte sur la nature du programme nucléaire iranien », a insisté Mme DiCarlo. Elle a appelé à « éviter une escalade catastrophique » et à privilégier « la diplomatie, le dialogue et la vérification ». L’ONU, a-t-elle conclu, « est prête à soutenir tout effort allant dans le sens de la paix, du dialogue et de la stabilité régionale ».

Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).

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