A l’occasion de la Journée internationale des peuples autochtones, le 9 août, l’ONU plaide pour la protection de leur souveraineté et de leurs droits de propriété intellectuelle, ainsi que pour leur inclusion dans les bénéfices du monde numérique.

« L’intelligence artificielle peut contribuer à préserver les langues en danger et les traditions orales, à cartographier les terres ancestrales et à amplifier le savoir des  autochtones pour lutter contre le changement climatique », a déclaré ce vendredi le Secrétaire général de l’ONU.

Participation réelle nécessaire

Dans son message, António Guterres a toutefois mis en garde : sans participation réelle des peuples autochtones, les nouvelles technologies risquent de perpétuer d’anciens schémas d’exclusion, de déformer leurs cultures et de violer leurs droits fondamentaux.

Actuellement, les données utilisées pour entraîner les modèles d’IA excluent souvent ou déforment les savoirs et les voix autochtones. Les algorithmes reflètent la vision du monde de leurs concepteurs et peuvent ainsi reproduire, voire aggraver, les inégalités existantes.

Par exemple, le recours croissant aux technologies biométriques et à la reconnaissance faciale peut accentuer les erreurs d’identification et le profilage des peuples autochtones.

Des serveurs dans un centre de données.

Une infrastructure aux impacts néfastes

Les systèmes d’IA reposent sur une immense infrastructure informatique, avec des centres de données nécessitant d’importantes quantités d’électricité, d’eau pour le refroidissement, et de matières premières pour fabriquer les équipements électroniques.

Cette empreinte peut accentuer les pressions climatiques et environnementales.

Lorsqu’ils sont installés à proximité des territoires autochtones, ces centres peuvent aggraver la dégradation des terres et la raréfaction des ressources, compromettant la disponibilité en eau et fragilisant les écosystèmes dont dépendent ces communautés pour leur survie et leurs modes de vie.

Ces risques ont été au cœur d’un panel virtuel organisé pour marquer la journée, réunissant représentants autochtones, experts en technologies et spécialistes des questions autochtones, sous le thème « Les peuples autochtones et l’IA : défendre les droits, façonner l’avenir ». 

Les participants ont souligné que la construction massive de centres de données dans leurs environnements peut nuire aux terres, aux ressources naturelles et aux écosystèmes, tout en ajoutant un nouveau défi à l’accès déjà limité aux nouvelles technologies, notamment dans les zones rurales, réduisant ainsi leur participation aux processus liés à l’IA.

Réduire la fracture numérique sans reproduire les inégalités

Parmi les participants, Fernando Marani, Directeur du Programme Justice et Inclusion du Centre de coopération internationale de l’Université de New York, a insisté sur la nécessité de combler la fracture numérique sans reproduire dans le monde virtuel les inégalités existantes.

« Nous devons amener la technologie dans les zones reculées et intégrer les communautés autochtones au monde numérique », a-t-il affirmé, soulignant l’importance d’écouter ces peuples et de prendre en compte leurs points de vue.

Il a également insisté sur la nécessité d’une inclusion éthique, assortie de supervision et d’une bonne gouvernance.

L’IA ne doit pas devenir une nouvelle forme de colonisation

Les peuples autochtones ne sont pas seulement les gardiens du passé : nous sommes les architectes de l’avenir

Pour que l’IA déploie tout son potentiel, l’ONU affirme que les peuples autochtones doivent être reconnus comme titulaires de droits, co-créateurs et décideurs. Leur inclusion significative, la souveraineté sur leurs données et une innovation ancrée dans leurs cultures sont essentielles pour que l’IA renforce leurs communautés et ne laisse personne de côté.

« Les peuples autochtones ne sont pas seulement les gardiens du passé : nous sommes les architectes de l’avenir, et cet avenir, s’il veut être juste et durable, devra se construire avec nous, pas sans nous », a affirmé lors de son intervention Moi Guiquita, autochtone Waorani de l’Amazonie équatorienne, militant et créateur de contenus pour la Fondation Waponi Amazon.

« L’IA ne peut pas être une nouvelle forme de colonisation numérique : elle doit être une opportunité pour renforcer notre autonomie, protéger nos cultures et garantir l’avenir de notre terre et des peuples qui y vivent », a-t-il ajouté lors du panel virtuel.

Un robot pour sauver la langue anishinaabemowin

« Pendant des générations, les langues autochtones ont été systématiquement effacées, notamment à travers le système des pensionnats. Perdre notre langue, c’est perdre qui nous sommes », a rappelé à son tour Danielle Boyer, inventrice du SKoBot, un petit robot personnel conçu pour revitaliser la langue anishinaabemowin.

Décoré de motifs floraux Nishnawbe, le SKoBot parle avec les voix enregistrées d’enfants de la communauté et accompagne un programme éducatif élaboré avec des enseignants en langue.

« La technologie a le pouvoir de protéger et de défendre, mais seulement si elle est utilisée de façon éthique et avec le consentement éclairé de la communauté », souligne-t-elle, précisant que le projet a été dirigé par une équipe de jeunes autochtones.

Face aux dérives de l’intelligence artificielle, Danielle Boyer dénonce l’utilisation de modèles génératifs pour créer des contenus sur les langues autochtones sans consentement, y compris des livres pour enfants écrits par des auteurs non autochtones, souvent remplis d’erreurs et de représentations inexactes. 

« L’anishinaabemowin n’est pas une langue que l’IA peut reproduire », insiste-t-elle, estimant que la technologie ne peut qu’accompagner l’apprentissage, jamais le remplacer.

Le SKoBot fonctionne hors ligne, avec une IA développée localement par de jeunes ingénieurs autochtones. Il n’est ni traducteur ni grand modèle linguistique : il décompose les mots pour révéler leur sens et répond avec des voix humaines authentiques.

Pour sa créatrice, toute solution technologique touchant aux langues autochtones « doit être conçue par nous et pour nous, entièrement ».

Protéger les droits de propriété intellectuelle

Le Secrétaire général a insisté sur la nécessité de lever les obstacles qui empêchent l’accès des peuples autochtones aux nouvelles technologies, en protégeant leur souveraineté sur les données, ainsi que leurs droits de propriété intellectuelle, et en veillant à leur inclusion effective dans le développement de l’IA.

« Nous devons nous assurer que l’intelligence artificielle soit développée et réglementée de manière inclusive, éthique et équitable », a déclaré António Guterres.

Une lutte séculaire

Leonor Zalabata Torres, ambassadrice de Colombie auprès de l’ONU et membre du peuple autochtone Arhuaco, a rappelé dans un message vidéo que cette journée commémore « une lutte centenaire pour la reconnaissance des droits des peuples autochtones ».

Elle a invité à réfléchir à la manière dont l’IA peut promouvoir ces droits et contribuer à la mise en œuvre des décisions de la Déclaration des droits des peuples autochtones.

Comme le Secrétaire général, elle a plaidé pour la protection de la propriété intellectuelle des savoirs intégrés aux algorithmes. « Nous devons poursuivre notre appel à intégrer une perspective autochtone dans le développement de l’IA ».

Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).

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