La Conférence académique 2025 sur l’Afrique, qui s’est tenue au siège des Nations Unies au début du mois, a réuni des universitaires, ministres et militants africains afin d’examiner les raisons pour lesquelles beaucoup d’habitants du continent estiment que leurs pays s’engagent sur la mauvaise voie, et les changements nécessaires pour que l’Afrique puisse occuper la place qui lui revient dans un ordre mondial en pleine mutation.
Dans un entretien accordé à Ben Dotsei Malor d’ONU Info, Mme Duarte a partagé les principaux enseignements qu’elle a tirés de cette rencontre stimulante.
Selon elle, la transformation des mentalités, la reconquête du riche patrimoine culturel du continent et le renforcement des institutions sont des étapes essentielles vers une véritable transformation.
Cet entretien a été légèrement modifié pour plus de clarté et de concision.
La Conseillère spéciale pour l’Afrique accorde un entretien à ONU Info.
ONU Info : Quels sont les trois principaux enseignements que vous retenez de la Conférence académique sur l’Afrique de 2025 ?
Cristina Duarte : Premier enseignement : il faut reconnaître que l’Afrique n’a pas « un million de problèmes ». Selon moi, l’Afrique n’a qu’un seul problème : un problème de mentalité. Une fois que nous aurons changé cette mentalité et valorisé le savoir africain comme fondement du développement, tout le reste suivra une nouvelle direction.
Deuxième enseignement : il faut reconnaître que l’Afrique, malgré près de 60 ans d’indépendance, est malheureusement confrontée à un défi de construction nationale, un défi de construction étatique.
Troisième enseignement : l’Afrique doit maîtriser ses propres ressources. Bien que l’Afrique soit confrontée à un endettement important, elle n’est pas pour autant un pays surendetté. La raison de ce surendettement est que l’Afrique ne maîtrise pas ses flux économiques et financiers.
ONU Info : Quel aspect de la mentalité faut-il transformer ?
Cristina Duarte : Trop souvent, les décideurs politiques africains se tournent vers l’extérieur – pour obtenir des prêts, de l’aide ou des investissements – avant de se tourner vers l’intérieur. Chaque jour, l’Afrique perd environ 1,4 milliard de dollars, soit 500 milliards de dollars par an, en raison d’inefficacités et de fuites de capitaux.
Pourtant, nous continuons de prioriser l’Aide publique au développement (APD) [aide financière aux taux préférentiels accordée par des pays donateurs aux pays en développement], qui représente à peine 10 % de ce montant.
Notre modèle de développement doit évoluer : il ne s’agit plus de dépendre de l’aide extérieure, mais de mobiliser les ressources nationales, non pas en augmentant les impôts, mais en utilisant plus efficacement les ressources existantes.
ONU Info : Quelle est la place des transferts de fonds des Africains de la diaspora ?
Cristina Duarte : La question des transferts de fonds est avant tout une question de mentalité.
Les transferts de fonds dépassent 100 milliards de dollars par an, soit plus que l’Aide publique au développement et les investissements directs étrangers réunis. Pourtant, ils sont considérés comme des flux extérieurs, ce qui est erroné ; ils proviennent de Capverdiens, de Ghanéens, de Nigérians.
Du point de vue des politiques publiques, il est essentiel de considérer les transferts de fonds comme un flux intérieur et de déterminer la meilleure façon de les intégrer à votre stratégie de financement du développement.
ONU Info : La majorité de la population africaine, soit plus de 60 %, est composée de jeunes de moins de 25 ans. Comment valoriser ce potentiel ?
Cristina Duarte : Actuellement, c’est loin d’être un atout. C’est un véritable cauchemar. Plus de 85 % de ces jeunes Africains travaillent dans le secteur informel.
Pour changer cela, nous devons investir les richesses que nous générons déjà – ces 500 milliards de dollars – dans la construction d’écosystèmes économiques robustes et de secteurs productifs.
Il est impératif de déployer massivement les filières STEM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) afin que chaque jeune Africain dispose des outils nécessaires pour trouver un emploi décent. J’aime à dire : « Si vous avez un baobab avec le Wi-Fi, installez-y des formations STEM ».
Du point de vue des politiques publiques, il est essentiel de reconnaître que l’État a la responsabilité de créer les écosystèmes économiques propices et que les jeunes Africains ont la responsabilité de tirer parti de ces écosystèmes et de créer leurs propres emplois.
ONU Info : Vous avez évoqué la faiblesse des États et les défis de la gouvernance. Qu’est-ce qui vous donne espoir pour l’avenir de l’Afrique ?
Cristina Duarte : L’avenir est de notre côté. D’ici 2050, quatre jeunes sur cinq dans le monde seront africains ; les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Nous devons également cesser d’importer des modèles occidentaux réducteurs. L’Afrique possède des traditions démocratiques profondément enracinées – consensus, participation et responsabilité sociale – qui devraient inspirer une démocratie « Made in Africa ». La crise de gouvernance actuelle est une occasion de reconstruire des systèmes politiques mieux adaptés aux réalités africaines.
ONU Info : Quel message souhaitez-vous adresser aux participants de la Conférence académique sur l’Afrique de cette année ?
Cristina Duarte : Nous devons tous prendre conscience du défi que représente un changement de mentalité. Les décideurs politiques et les universitaires ont besoin d’un « contrat de partage des connaissances ».
Les décideurs politiques doivent intégrer les savoirs africains pour repenser les politiques, et les universitaires doivent adapter leurs travaux aux réalités africaines.
Tous deux se sont tournés vers l’extérieur : les décideurs politiques pour les ressources, les universitaires pour la reconnaissance. Il est temps de nous tourner vers l’intérieur et de travailler ensemble pour tracer la voie de l’Afrique pour les 25 à 50 prochaines années.
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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