Le constat est implacable : la moitié de la population afghane dépend désormais de l’aide humanitaire. Un Afghan sur cinq souffre de la faim. Environ 3,5 millions d’enfants sont en situation de malnutrition aiguë. Et plus de deux millions de filles sont privées d’école au-delà de 11 ans, en raison des interdictions imposées par les autorités talibanes.

« Le peuple afghan fait face à des besoins humanitaires persistants et aigus, aggravés par des décennies de conflit, une pauvreté structurelle, un climat de plus en plus hostile, des restrictions sévères sur les droits des femmes et des filles, ainsi qu’un contexte de financement extrêmement limité », a déclaré Joyce Msuya, Sous-Secrétaire générale de l’ONU aux affaires humanitaires, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, lundi, à New York.

À cette précarité s’ajoute une crise écologique alarmante. Joyce Msuya a évoqué la menace d’une catastrophe hydrique : « Kaboul risque de devenir la première ville au monde à épuiser ses réserves d’eau », a-t-elle prévenu, rappelant que les nappes phréatiques dans la capitale afghane ont baissé de 30 mètres en dix ans.

Face à ces urgences multiples, les humanitaires s’efforcent de répondre aux besoins les plus pressants. Mais leurs efforts sont mis à mal par une baisse drastique des financements. En quelques mois, 420 établissements de santé ont été contraints de fermer. Trois millions de personnes ont ainsi perdu l’accès aux soins. Près de 300 centres nutritionnels ont cessé leurs activités. « Le niveau des besoins dépasse largement les financements disponibles », a insisté Mme Msuya, alors que le plan de réponse humanitaire pour le pays reste financé à seulement 21 %.

Les femmes, premières victimes

Dans ce paysage de crise, les femmes et les filles se retrouvent en première ligne. Depuis la prise de pouvoir des talibans en 2021, les interdictions n’ont cessé de s’accumuler. « La répression s’est systématisée, s’inscrivant désormais dans des structures et des lois », a dénoncé Sima Bahous, Directrice exécutive d’ONU Femmes. 

Ce verrouillage institutionnalisé du droit des femmes transforme leur quotidien en lutte silencieuse. Privées d’école, de soins, de travail et de perspectives, elles sont comme effacées de la sphère publique. « Certaines filles prient pour échouer à leurs examens, simplement pour pouvoir rester un peu plus longtemps à l’école. D’autres ne sont jamais envoyées à l’école. Pourquoi croire en l’avenir, quand l’espoir lui-même est interdit ? », a interrogé Mme Bahous, dans une déclaration poignante.

Un dialogue fragile, une confiance à bâtir

Face à ce tableau accablant, les Nations Unies cherchent à maintenir un dialogue structuré avec les autorités de facto. « Il ne s’agit pas de normaliser le statu quo, mais de faire en sorte que des questions fondamentales, notamment le respect des obligations internationales, restent au cœur du dialogue », a déclaré Roza Otunbayeva, Représentante spéciale du Secrétaire général pour l’Afghanistan. 

La MANUA, la mission politique de l’ONU sur place, s’efforce de préserver des canaux ouverts, tout en appelant à la levée des mesures les plus restrictives. 

Mme Otunbayeva a salué certains signes de coopération, comme les garanties d’accès obtenues auprès du bureau pénitentiaire pour visiter les prisons, hommes et femmes confondus. Mais elle a également dénoncé les menaces de mort reçues en mai par des dizaines de collaboratrices afghanes de l’ONU, révélant la persistance d’un climat d’impunité.

Divisions au Conseil

Les échanges entre délégations au Conseil ont mis en évidence des clivages persistants sur la manière d’aborder la situation : d’un côté, une approche axée sur les droits humains et la pression diplomatique ; de l’autre, un appel à un dialogue pragmatique.

Le représentant de l’Afghanistan a exprimé ses « graves préoccupations » face à l’approche « mosaïque » de l’ONU, élaborée, selon lui, sans réelle consultation. Il a dénoncé un processus « descendant et non participatif », tenant à l’écart les forces vives du pays. « Le peuple afghan […] doit être au centre de cet effort et non relégué à la marge », a-t-il insisté, avant de mettre en garde contre une asymétrie dangereuse : les talibans formuleraient des revendications précises, tandis que la communauté internationale se contenterait d’attentes floues et non contraignantes.

Sensibles à cet argument, la Russie a rejeté toute forme de pression, plaidant pour un dialogue « patient » avec les autorités de facto. Le représentant de Moscou a ainsi salué la résilience d’un pays « qui n’est pas devenu un trou noir » malgré les sanctions et « la fuite honteuse des troupes américaines et de l’OTAN ». Il a défendu une aide « durable et apolitique », recentrée sur les besoins du peuple afghan.

À rebours, la France a mis en cause l’inaction du régime taliban et l’absence de progrès. « La fermeture des écoles depuis plus de trois ans et les restrictions […] relèvent de la ségrégation », a dénoncé son représentant. Soulignant l’échec de la stratégie des petits pas, Paris appelle à un changement de méthode : un cadre structuré, adossé à la nomination d’un Envoyé spécial, pour conduire un dialogue politique exigeant et véritablement inclusif.

Les États-Unis ont, eux aussi, plaidé pour une ligne plus ferme. « Nous continuons d’obtenir les mêmes discours sans exiger de résultats », a regretté leur représentante, appelant à des « changements de l’intérieur » et à une coordination internationale plus cohérente.

Un risque d’abandon

Au-delà des atteintes aux droits, le retrait progressif de l’aide internationale fait peser une menace directe sur les opérations humanitaires. Le programme de déminage, pourtant vital dans un pays encore infesté de restes explosifs, s’apprête à cesser ses activités dès juillet, faute de financements. « Les mines et munitions non explosées ont tué des centaines de personnes cette année, majoritairement des enfants », a alerté Roza Otunbayeva.

À cette vulnérabilité intérieure s’ajoutent les secousses géopolitiques environnantes. Les tensions entre l’Iran et Israël se répercutent déjà sur le quotidien des Afghans : flambée des prix, ralentissement du commerce, vagues de retours précipités. « Les défis actuels sont déjà considérables », , a-t-elle prévenu. « ils ne feraient que s’aggraver dans un environnement régional plus conflictuel ».

Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).

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