Les signaux d’alerte s’intensifient autour de la République centrafricaine. Invité mercredi au Conseil de sécurité des Nations Unies, Jean-Pierre Lacroix a dressé un constat nuancé mais préoccupant. « La République centrafricaine se trouve à un moment charnière », a-t-il averti, appelant à « un soutien international renforcé » pour ne pas laisser s’éroder les progrès encore fragiles enregistrés ces dernières années.
Le ton grave de son intervention a trouvé un écho immédiat dans l’actualité du pays : la veille, un incendie a ravagé le Lycée Barthélemy Boganda, à Bangui, faisant vingt-et-une victimes, dont dix-neuf jeunes filles. « La MINUSCA reste pleinement mobilisée […] pour faire face à cette tragédie », a déclaré M. Lacroix, en référence à la mission de maintien de la paix de l’ONU déployée dans le pays. Un drame national, en pleine période d’examens, qui rappelle la vulnérabilité structurelle d’un État encore marqué par les conflits.
Le calendrier électoral sous pression
À quelques semaines de scrutins majeurs — locaux, législatifs et présidentiel —, les incertitudes s’accumulent. Prévue pour le 31 août, la tenue des élections locales semble compromise. « La publication de la liste électorale définitive, initialement prévue pour le 29 mai, est en attente en raison de difficultés techniques », a reconnu M. Lacroix, tout en saluant la volonté politique affichée par les autorités.
La MINUSCA, mandatée pour accompagner le processus électoral, craint désormais une désorganisation en cascade. « Le processus électoral est à un tournant délicat », a souligné le responsable onusien, en appelant les autorités centrafricaines à clarifier rapidement la suite du calendrier. « Il est essentiel de préserver les progrès réalisés, de mobiliser les ressources nécessaires et de prévenir tout revers ».
Menaces à l’est, instabilité au sud
Pendant ce temps, le terrain reste instable. Dans le nord-est, les conséquences du conflit au Soudan voisin se font sentir avec une acuité croissante. Le 20 juin, une patrouille de la MINUSCA a été attaquée à Am-Sissia, à 34 kilomètres de Birao. Un casque bleu zambien a été tué. « Je condamne fermement cette attaque et adresse mes condoléances […] au Gouvernement zambien », a déclaré M. Lacroix, exhortant les autorités centrafricaines à identifier les auteurs et à les traduire en justice.
Dans le sud-est, les tensions restent vives. Des exactions sont signalées dans la zone d’action du groupe Azande Ani Kpi Gbe (AKKG). Le 28 mars, un observateur militaire kényan a été tué près du village de Tabane. Il s’agit du troisième casque bleu tué depuis février.
La justice, dernier rempart menacé
Sur un autre front, moins visible mais tout aussi stratégique, la justice transitionnelle donne des signes d’essoufflement. Faute de financement, la Cour pénale spéciale (CPS), créée pour juger les crimes les plus graves, pourrait voir ses activités suspendues dès septembre. « Cela compromettrait un investissement collectif de plus d’une décennie », a mis en garde Jean-Pierre Lacroix.
Le paradoxe est cruel : quelques jours plus tôt, le 19 juin, la Cour avait rendu son troisième verdict dans une affaire impliquant une faction armée du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC) dans la région de Ndélé. Un signal d’espoir, mais peut-être sans lendemain si la communauté internationale ne réagit pas.
Soutien international, divergences nationales
Autour de la table du Conseil, les États membres ont exprimé leur appui, non sans divergences de ton. La France a salué les efforts de Bangui en matière électorale, de gestion des frontières et de mise en œuvre de l’accord de paix de 2019, tout en promettant de « travailler avec tous les membres du Conseil […] sur le renouvellement des mesures coercitives visant les groupes armés ». Le pays a également annoncé un soutien financier de deux millions d’euros pour les scrutins.
La Russie, elle, a mis en avant les progrès militaires du gouvernement, qui « contrôle désormais presque tout le territoire ». Mais derrière cette rhétorique de soutien, Moscou a décoché quelques flèches à peine dissimulées contre Paris. Sa représentante a exigé un appui fondé sur « la non-ingérence dans les affaires intérieures », rejetant les « pratiques coloniales éculées » — une critique clairement adressée à l’ancienne puissance coloniale.
D’autres États ont élargi le cadre d’analyse. La Chine a souligné l’importance de « consolider les bases de la paix » par le développement économique, en misant sur l’éducation et l’emploi. Le Panama, lui, a insisté sur la nécessité d’un « appui technique et institutionnel » à la sécurité et aux services publics.
Protéger les civils, financer les scrutins
Le Royaume-Uni s’est inquiété des effets de la guerre au Soudan et a appelé les autorités centrafricaines à mieux coordonner leur réponse sécuritaire, pour garantir la paix. Le Pakistan, quant à lui, a fermement dénoncé les attaques répétées contre les Casques bleus, qu’il a qualifiées de « crimes de guerre ».
Enfin, au nom de l’Algérie, de la Sierra Leone et de la Somalie, la représentante du Guyana a insisté sur l’urgence d’un financement prévisible du processus électoral via le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). « Assurer l’inclusivité, la transparence et le caractère pacifique des élections locales, présidentielle et législatives doit rester notre priorité », a-t-elle déclaré.
Un espoir ténu, mais tenace
Malgré les menaces, des signaux positifs subsistent. Des efforts sont engagés pour redéployer les institutions de l’État sur l’ensemble du territoire, en lien avec la politique nationale de gestion des frontières. La MINUSCA renforce également sa coopération avec le secteur privé pour stimuler l’économie locale et créer des emplois.
Si les progrès restent précaires, en conclusion, Jean-Pierre Lacroix s’est voulu positif : « Si l’engagement national se poursuit et si le soutien international est renforcé, la République centrafricaine peut devenir un exemple de réussite — pour son peuple, pour les opérations de paix et pour ce Conseil ».
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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