« Le précédent établi aujourd’hui sur les champs de bataille continuera longtemps de nous hanter », a lancé, jeudi, Mirjana Spoljaric Egger, présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), lors d’un débat public du Conseil de sécurité de l’ONU consacré à la protection des civils dans les conflits armés. Devant les représentants des États membres, elle a dressé un constat glaçant : 130 conflits armés sont actuellement en cours, « plus que l’an dernier, et six fois plus qu’il y a 25 ans ».
Sa voix s’est jointe à celles de plusieurs hauts responsables humanitaires, qui ont dénoncé à l’unisson l’effondrement des normes censées protéger les populations civiles, et particulièrement les femmes et les enfants. « Où se trouve le courage politique de mettre fin aux massacres ? », a interrogé Mme Spoljaric Egger. « Le moment de décrocher votre téléphone est venu : personne ne veut vivre dans un monde où le droit de la guerre s’applique seulement à vos ennemis et pas à vous-mêmes ou vos alliés ».
Le droit de la guerre systématiquement contourné
Le sombre tableau dressé par la présidente du CICR a été étoffé par Tom Fletcher, le chef des opérations humanitaires de l’ONU, qui a rappelé que l’année 2024 avait été « la plus meurtrière jamais enregistrée pour les travailleurs humanitaires », dont plus de 360 ont été tués, en majorité à Gaza. Un chiffre qui illustre, selon lui, la détérioration alarmante de la protection des civils et des agents humanitaires sur le terrain.
Il a dénoncé un climat d’impunité, nourri par une instrumentalisation croissante de l’aide et par une dérive inquiétante des pratiques militaires : « Certains ont justifié des atteintes massives aux civils par des lectures permissives du droit, redéfinissant à leur convenance ce qui constitue une cible légitime ou un objectif militaire ».
Cette dérive est, selon lui, aggravée par l’usage de nouvelles technologies. L’intelligence artificielle, notamment, serait déjà utilisée pour sélectionner des cibles militaires, soulevant de « graves inquiétudes quant au respect du droit international humanitaire et à l’érosion du contrôle humain ». Et de conclure : « Nous assistons à un démantèlement de l’architecture de protection des civils que nous avons mis des décennies à bâtir ».
Les femmes ne sont pas des dommages collatéraux
Dans une déclaration particulièrement poignante, Sima Bahous, la directrice exécutive de l’agence ONU Femmes, a alerté sur la spécificité des violences subies par les femmes dans les conflits modernes. « En temps de guerre, les femmes et les filles ne sont pas seulement prises entre deux feux. Elles, leurs corps, leur santé, leurs choix et leurs voix sont délibérément ciblés ».
Mme Bahous a évoqué des maternités bombardées, des soins postnataux inaccessibles, des femmes accouchant sans anesthésie et sans eau potable. « En Afghanistan, une femme meurt toutes les deux heures de complications liées à la grossesse. À Gaza, plus de 28.000 femmes et filles ont été tuées depuis octobre 2023, soit une toutes les heures ». Pour la dirigeante, il est urgent de reconnaître les violences reproductives comme une catégorie à part entière, constitutive de crimes de guerre. « La destruction des infrastructures de santé reproductive représente une violation flagrante du droit international — et coûte la vie aux femmes »
Les enfants souffrent en premier – et plus longtemps
Janti Soeripto, présidente-directrice générale de l’ONG Save the Children US, a rappelé que 473 millions d’enfants vivent aujourd’hui dans des zones de conflit. Elle a livré un témoignage sans détour, citant Fadumo, une soignante en Somalie, qui décrit le dernier stade de la survie humaine dans les cas la malnutrition infantile en ces termes : « L’enfant devient un squelette, sa peau se colle à ses os, des ampoules apparaissent, les cheveux pâlissent, il pleure toute la journée ».
Davantage vulnérables aux explosions, à la faim et aux maladies, les enfants « sont sept fois plus susceptibles que les adultes de mourir de blessures dues aux bombardements ». Mme Soeripto a accusé les États de chercher des solutions techniques à des crises fondamentalement politiques : « Quand une école est bombardée ou qu’un travailleur humanitaire est tué, ce n’est pas un accident. C’est un choix politique ».
De la dénonciation à l’action
Tous les intervenants ont exhorté les membres du Conseil de sécurité à traduire leurs engagements en actes. Pour Sima Bahous, de l’ONU Femmes, cela passe par « un soutien accru aux organisations de femmes sur le terrain », qui font face à des coupes budgétaires menaçant leur survie. Aux yeux de Tom Fletcher, le chef de l’humanitaire, il faut « garantir une justice non sélective » et soutenir les juridictions nationales et internationales. Quant à Janti Soeripto, elle a plaidé pour la nomination urgente d’un président du groupe de travail sur les enfants et les conflits armés, « l’un des plus actifs du Conseil ».
Chacun d’entre eux a martelé cette vérité inlassable : les traités ne suffisent pas, seule la volonté politique peut sauver des vies. « Que l’on se souvienne de nous non pas pour les avertissements que nous avons lancés, mais pour les actions que nous avons prises », a conclu Tom Fletcher.
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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