Déclenchée en avril 2023 par la rupture entre le général Abdel Fattah al-Burhan, à la tête du pays depuis 2019, et le chef du groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (FSR), Mohamed Hamdan Daglo, la guerre civile a plongé 30 millions de Soudanais dans la détresse humanitaire et contraint 10 millions d’entre eux à prendre la fuite, dont la moitié sont des enfants. Selon l’Unicef, il s’agit du niveau de déplacement d’enfants le plus élevé au monde.
Depuis l’an dernier, la famine touche plusieurs zones du pays, y compris le Darfour, dans l’Ouest, l’une des régions les plus touchées par le conflit. La prise de contrôle, fin novembre, d’El-Fasher, la capitale du Darfour du Nord, par les FSR, après plus de 540 jours de siège, a achevé de révéler l’ampleur du désastre.
Des réfugiés soudanais, en majorité des femmes et des enfants ayant fui les violences à El Fasher et dans d’autres zones du Darfour, arrivent au Tchad.
El Fasher, ville martyre
Les survivants décrivent un engrenage de violences méthodiques, de pénuries absolues et d’attaques ciblées contre les civils, dans cette ville où les hôpitaux restants ont été bombardés, pillés ou désertés. « Des femmes nous disent avoir enduré la famine, le déplacement, le viol et les bombardements », rapporte Fabrizia Falcione, la représentante de l’agence de l’ONU pour la santé reproductive (UNFPA) au Soudan. « Des femmes enceintes ont accouché dans la rue, le dernier hôpital de maternité ayant été pillé et détruit ».
Autour d’El-Fasher, l’exode de plus de 100 000 civils depuis fin octobre se poursuit vers les villes voisines de Tawila, Korma et Malit, transformées en refuges précaires où les humanitaires ne parviennent plus à répondre aux besoins les plus élémentaires. Pour les femmes et les filles, prendre la fuite devient un guet-apens potentiel. « À chaque pas – pour aller chercher de l’eau, ramasser du bois, ou se tenir dans une file pour recevoir de la nourriture – elles couraient le risque d’être victimes de violences sexuelles », poursuit Mme Falcione. Selon elle, « le corps des femmes est devenu une scène de crime ». Il n’existe plus un seul espace sûr où chercher protection ou assistance psychosociale.
La directrice de l’UNICEF, Catherine Russell, assiste à un cours de CM2 dans une école de l’État de Kassala, au Soudan.
Une génération d’enfants brisée
L’Unicef dresse un constat tout aussi implacable. « Les enfants au Soudan vivent dans une violence, une faim et une peur incessantes », raconte la directrice générale de l’agence onusienne pour la protection de l’enfance, Catherine Russell, de retour d’une visite dans le pays. Les plus jeunes, poussés sur les routes par l’effondrement des services vitaux, arrivent, selon elle, « exténués, déshydratés et en urgent besoin de protection, de nutrition et de soutien médical ».
Même à Kassala, loin du front darfouri, les récits des enfants rescapés révèlent la même spirale. Dans cet État à l’extrémité est du pays, Mme Russell a rencontré un garçon qui avait fui El-Fasher avec sa famille. « Ils ont été arrêtés à plusieurs reprises en chemin par des hommes armés qui exigeaient de l’argent pour leur passage. Il m’a dit que c’était une expérience terrifiante ».
Une adolescente issue des environs de Khartoum, la capitale, dont le gouvernement du général al-Burhan a fui l’instabilité pour s’établir à Port-Soudan, sur la mer Rouge, a raconté à la directrice générale le déclenchement de la guerre. « Des hommes armés ont attaqué son village, ils ont commencé à tuer des gens, dont son grand-père et son oncle, tandis que des filles étaient violées ou enlevées ».
Une violence nourrie par des motifs ethniques
Depuis Genève, les experts indépendants du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale mettent en cause la dimension ethnique de la violence.
Après la prise d’El-Fasher par les miliciens arabes des FSR, le comité évoque « des actes de torture, des exécutions sommaires, la détention arbitraire de civils et l’usage généralisé et systématique du viol comme arme de guerre » prenant pour cible les Four, Masalits et Zaghawas, trois communautés de la région ethniquement non arabes.
Les attaques des paramilitaires contre les structures de santé, les massacres de blessés, les blocages de l’aide et les assauts contre les travailleurs humanitaires sont décrits par le comité comme autant de stratégies délibérées d’asphyxie des populations.
Des milliers de personnes fuient les violences à El Fasher, dans le Darfour du Nord, et au Kordofan.
Le Kordofan, deuxième front de l’effondrement
Au Kordofan, une région voisine du Darfour devenue l’autre grand front du conflit, les affrontements entre l’armée nationale et les FSR accélèrent l’effondrement humanitaire. Les villages se vident, les routes deviennent impraticables, les convois sont détournés ou immobilisés. Les familles qui parviennent à fuir rejoignent des zones où les services essentiels ont cessé de fonctionner et où les humanitaires sont privés d’accès.
Malgré « de sévères obstacles d’accès », l’Unicef poursuit des opérations de réunification familiale, de soutien aux survivantes de violences sexuelles et de réponse aux flambées de choléra. Mais les besoins grandissent à un rythme vertigineux. L’agence rapporte qu’au Darfour du Nord, un simple paquet de serviettes hygiéniques atteint 27 dollars, soit un quart de l’aide en espèces destinée à une famille de six personnes.
Un pays au bord du gouffre
Alors que le pays glisse vers un point de non-retour, le Comité onusien appelle à « des enquêtes rapides, efficaces, impartiales et publiques » et à un cessez-le-feu immédiat. L’Unicef réclame que les parties garantissent « la sécurité et la dignité de chaque enfant et de chaque civil ».
Mais ce sont les mots des victimes, confiés à Catherine Russell, qui résument avec le plus de force l’épuisement d’un peuple abandonné au fracas des armes. « Partout où je suis allée, les enfants m’ont dit la même chose », affirme la directrice : « Tout ce que nous voulons pour le Soudan, c’est la paix ».
Source of original article: United Nations (news.un.org). Photo credit: UN. The content of this article does not necessarily reflect the views or opinion of Global Diaspora News (www.globaldiasporanews.com).
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